Description


Les composantes physiques identitaires


Une histoire géologique qui a construit un littoral complexe où terre et mer se sont mélangés


Carte géologique de l'unité paysagère


Schéma de principe de formation géologique au paléozoïqueAu paléozoïque, les plissements hercyniens marqués par une direction varisque (nord ouest / sud est) se traduisent par une importante chaîne de montagnes. Cette direction structurante qui se met en place dès cette époque se lit encore aujourd'hui.
: Schéma de principe de formation géologique au mésozoïqueLa pénéplanation (érosion jusqu'à aplanissement) post hercynienne (- 250 millions d'années) met à nu la racine de ces plis. A cette époque, l'Atlantique est en formation et la naissance des Alpes fait rejouer les failles varisques. L'érosion marine, en creusant les roches plus tendres met en relief les parties varisques plus dures; le socle paysager hérité de l'ancienne chaîne de montagnes se met en place.
Schéma de principe de formation géologique au cénozoïqueLes dernières ères géologiques sont marquées par l'accentuation de l'érosion des vallées (liée à des périodes de glaciation qui ont largement éloigné le littoral), puis l'ennoyage des bordures littorales qui va progressivement former le littoral que l'on connaît aujourd'hui et les marais rétro-littoraux.
Extrait de la carte géologique au niveau des marais de GuérandeLa mise en place de la zone des marais salants de Guérande est liée au développement de deux grands cordons dunaires (les tombolos) l'un sur la Baule et l'autre sur Pen Bron à la Turballe qui ont rattaché la crête rocheuse du Croisic au sillon de Guérande. Un morceau d'océan fut ainsi emprisonné dans les terres.

Un relief peu accentué avec des crêtes qui mettent en scène le paysage


Carte du relief de l'unité


Vue sur le coteau guérandais depuis les maraisLe relief met clairement en lecture les trois sillons qui structurent cette unité paysagère séparant les deux zones de marais. Ces derniers, quasi plans au niveau de la mer, soulignent les coteaux plus ou moins élevés qui les entourent :
• la petite crête urbanisée du Croisic au Pouliguen,
• le sillon plus marqué de Guérande
• les coteaux doux de Saint Molf et Asserac
Au revers des coteaux marquant la direction nord ouest / sud est, on retrouve des plateaux faiblement inclinés vers le nord est légèrement ondulés par des vallons qui suivent cette même direction. Le relief y est peu mouvementé mais suffisamment ondulé pour créer des animations dans la perception des paysages.

Un paysage Terre & Mer : les marais de Guérande et du Mès.


Les marais de Guérande vus du site du Pradel


Le marais salant est un véritable bas relief sculpté par le labeur de l'homme. Ainsi, talus et canaux organisent une succession de bassins pour concentrer progressivement le sel. L'horizon est donc dégagé sur la vaste étendue du marais. Dans ce paysage ouvert, le regard est suspendu entre le ciel et son reflet dans la mosaïque aquatique. Pas même la trame des bossis, les levées de terre organisant les salines, ne constituent une accroche visuelle. On comprend dès lors, la force que prend chaque élément vertical qui se dresse dans cette étendue et par là même la sensibilité de ce paysage.
Végétation spécifique des maraisLa trame des talus enherbés prolonge dans l'eau l'ossature du bocage terrestre. L'homme ne vit pas dans le marais, il y travaille seulement. La végétation quant à elle s'adapte aussi. Elle se résume à quelques ponctuations de chênes verts et aux plantes halophiles (adaptées aux conditions de salinité) qui font varier au gré des saisons les couleurs du patchwork salin.
Salorges du Pradel et vue sur le marais depuis le Croisic


"C'est un creux de vase et d'algues que recouvrent les plus hautes marées et qu'inondent parfois la tempête. C'est un lieu où la terre se mêle à l'eau. Ca ne donne rien de bon. (...) Un lieu qu'on croit de mort beaucoup plus que de vie. La femme s'en approche pourtant. Elle a vu sur l'eau immobile des fleurs blanches qu'elle ne connaît pas. Des fleurs sans tige, qui flottent comme l'écume. Elle plonge sa main dans l'eau tiède en coupe et cueille timidement une de ces fleurs. C'est étrange, ça ressemble à la fois à du sable, à une pierre légère, c'est friable et blanc. D'une blancheur de nuage. (...) Cette fleur a le goût des vagues. (...) De la fleur sauvage découverte par une femme étonnée, les gens d'ici sont passés à la grande moisson blanche. De leur inquiétude des premières heures de découverte est née la confiance et un acte de plus pour leur grande alliance avec la nature. Ils ont domestiqué le marais." Bernard CLAVEL - La légende du sel

Des plateaux bocagers qui se referment...


Pâture du plateau bocagerSur les plateaux entre les marais, le réseau bocager est encore dense par endroits. On y retrouve une composition mixte de feuillus (chênes pédonculés, chênes verts) et de conifères (pins et cyprès de Lambert) caractéristiques du nord ouest du département. La particularité de ce bocage est certainement d'avoir des feuillus peu développés à la silhouette pittoresque. Cette trame bocagère est ponctuée de boisements qui referment ponctuellement l'espace. Par ailleurs, la pression urbaine rétro-littorale et la proximité des grandes agglomérations (la Baule, Saint Nazaire) ont catalysé la diffusion urbaine dans ces plateaux bocagers. Les prairies de pâtures ont laissé place aux jardins horticoles des pavillons dans la campagne, la rendant parfois imperceptible.

L'empreinte humaine


De nombreux sites archéologiques attestent que le sillon guérandais a joué très tôt un rôle de premier ordre dans l’économie de la région. Les premières traces de l’exploitation du sel remontent à l’époque Celte, et les premières salines à l’époque romaine.
Du XIV au XVIIème siècle, on assiste à un fort développement de Guérande et ses abords reposant sur l’essor du commerce du sel.
Détail de la 8ème Carte particulière des Costes de Bretagne qui comprend l'entrée de la Loire et l'Isle de Noirmoutier, publiée par Neptune Fran


À partir du XVIème siècle cependant, l'ensablement de ses sites portuaires et l'affaiblissement du sel comme monnaie d'échange font perdre à Guérande sa puissance maritime au profit du Croisic et de Pouliguen.
Marais salants au bourg de Batz, Michel Auguste Colle, 1940, huile sur cartonAu XIXème siècle, l'arrivée du chemin de fer et du tourisme balnéaire modifient en profondeur l'économie de la région. Au XXème siècle, on observe un fort développement urbain vers le littoral et à proximité des principales infrastructures. Le bocage ancien disparaît dans les années 1980 lors du remembrement à Guérande et sous le coup des avancées urbaines.

Réseau et infrastructures


Le réseau routier de l'unité se caractérise par la présence la "route bleue", axe structurant Nord-Sud formé par la D114, puis la N171 au sud, qui présente un profil de voie rapide et marque fortement le paysage.
Le contournement de Guérande est aujourd'hui largement dépassé par l'urbanisation. Des problèmes d'encombrement sont à noter en entrée de ville sud-est (RN 171), qui a par ailleurs bénéficié d'un aménagement paysager de qualité.
Le chemin de fer au sud de l'unité a été un vecteur d'évolution majeur des paysages puisqu'il a permis l'essor du tourisme balnéaire.
Schématisation du réseau


Habitat et architecture


habitat type BretonLe paysage est marqué par des éléments remarquables tels que monolithes, moulins à petit pied ou châteaux de granit.
Les matériaux de construction utilisés sur l'unité sont le granit et le schiste. Les matériaux de couverture utilisés sont l’ardoise et le chaume.
On retrouve trois principaux types architecturaux : la maison de style Breton, la maison du type paludier, et la maison du type briéron.
Habitat paludierLes villages paludiers, tournés vers les marais salants et non vers le littoral, sont constitués de maison de paludiers et de salorges.
Maison briéronneDes exemples de maisons Brieronne sont observables à l'est de l'unité. La maison briéronne présente des murs en pisé revêtus d’enduits blancs et un toit de chaume à forte pente. Elle ne comporte qu'un seul niveau, mais dispose d'un vaste grenier. On retrouve des cheminées en pisé très basses, de petites portes et fenêtres, et des menuiseries peintes en vert, bleu ou jaune vif.

Organisation urbaine


Des pressions fortes sont observées aux abords des zones agglomérées et des principales voies de desserte ce qui se traduit par une occupation urbaine progressive des coteaux.
Carte des pressions urbaines exercées sur le territoire - Proscot - projet de SCOT de Cap Atlantique


Cité médiévale fortifiée, la ville de Guérande se distingue particulièrement par la qualité des ambiances urbaines de son centre ancien. Dans l'enceinte entourée de douve s'enchevêtrent de nombreuses ruelles bordées de maisons à colombage ou de façades de granit. Cependant le développement de Guérande se poursuit en dehors des murs. Il n'a pas non plus été contenu par les contournements successifs. La question d'un nouveau contournement à l'est est par ailleurs posée.

On assiste à la disparition progressive des structures urbaines groupées, qui présentaient une densité peu élevée, mais une silhouette rassemblée.
La structure traditionnelle du hameau repose sur un bâti traditionnel implanté de manière souvent asymétrique pour former un espace commun autour d’éléments de type mare, four à pain, puits...

L'habitat dans le paysage


La disparition progressive des haies bocagères crée des ouvertures visuelles sur l’habitat.
A l’inverse, certaines résidences de standing viennent désormais se lover au cœur d’espaces boisés, à l’abri des regards.

Analyse structurelle


Démographie


L'évolution démographique est très dynamique. Les bassins de vie de La Turballe et Herbignac présentent une dynamique assez forte ou régulière.
Globalement, la population vieillit. Ecartés du littoral par la flambée des prix de l'immobilier, les jeunes se replient sur l'intérieur des terres.

Agriculture


Entre 1988 et 1990, la surface agricole utile a diminué de 20 à 30% sur l'unité, notamment du fait de l'étalement urbain.
L'unité est dominée par la production de lait et les cultures fourragères, mais aussi le maraîchage au sud-ouest.

Les marais salants


Les marais salants demeurent une activité identitaire majeure. Son caractère unique, son goût authentique, sa richesse en oligo-éléments font du sel de Guérande un produit de qualité (obtention du Label Rouge en 1991). Les marais salants de Guérande et du Mès sont labellisés Site Remarquable du Goût depuis 1996.

Description du paysage culturel des marais salants de Guérande inscrits au patrimoine mondial de l'UNESCO :
"Les marais salants de Guérande forment avec les traicts, un ensemble d'environ 2278 hectares et constituent un patrimoine exceptionnel et unique. En raison même des spécificités qui les caractérisent, c'est-à-dire la combinaison historique de facteurs écologiques et humains, ils sont sans doute le bassin salicole le plus individualisé, le plus chargé d'histoire, sinon le plus élaboré du littoral Atlantique français. Ils représentent un ensemble écologique de premier plan. Ils possèdent une extrême richesse et une extrême variété faunistique et floristique d'autant plus remarquable qu'ils sont une construction artificielle, fruit du travail de l'homme, et ne perdurant que pour autant que l'activité salicole se poursuit.
Vu du coteau de Guérande, le marais se présente comme un enchevêtrement de levées de terre sinueuses qui délimitent une multitude de bassins imbriqués les uns dans les autres. Certaines pièces d'eau sont découpées par un réseau de diguettes qui rehaussent l'aspect artificiel du paysage. L'étendue qui commence au pied du coteau ne compte ni arbre, ni bâtiment hormis les masses sombres des magasins à sel. La simple vue des marais fait pressentir sa très grande spécialisation et sa fragilité en tant que milieu contrôlé par I'homme depuis plus d'un millénaire. Les marais salants proprement dits ont été construits à partir de baules d'argile bleue.
L'omniprésence d'eau et les caractéristiques de sa circulation constituent toute la vie du marais : vie sauvage et activités des hommes.

À la suite de la crise de la production de sel sur la côte atlantique, une part importante des salines est aujourd'hui inexploitée.
Aujourd'hui, les marais salants de Guérande et du Mes s'étendent encore sur 2000 hectares, même si l'activité a décliné depuis le développement des conserveries (le sel servait à la conservation des aliments).La chute des besoins en sel et la concurrence du sel méditerranéen entraînèrent une grave diminution de l'activité. Les producteurs s’inscrivent aujourd’hui dans une communication valorisant un produit spécifique haut de gamme.

Tourisme


L'activité touristique du littoral rayonne fortement sur l'unité et a des incidences importantes sur le secteur résidentiel et l'hébergement marchant.

Analyse sensorielle


La presqu’île guérandaise, c’est une mélange entre la terre et l’océan, qui pour le plaisir de nos yeux viennent former une mosaïque d’éléments et de couleurs changeantes selon les états d’âme du ciel. Lorsque l’on s’approche des marais, des parfums iodés et la sensation d’être dans une partie de la terre unique au monde vous envahissent devant ce paysage presque désertique, et pourtant si riche. La fleur de sel de Guérande, qui bénéficie d’un label rouge, gage de qualité, vient assaisonner les plats du monde entier. Les paludiers contribuent à la production de 10 000 tonnes de sel par an.
Mais la presqu’île guérandaise c’est aussi des espaces urbanisés diversifiés, à cheval entre le calme des marais, et les bruits de la ville.